Veille technologique : approche, méthode et résultats

Veille technologique : approche, méthode et résultats

Débordés par le day to day et la résolution de problèmes urgents, certains dirigeants ont tendance à négliger la réalisation d’un travail minutieux, méthodique et organisé lorsqu’il s’agit de décider d’utiliser un nouvel outil dans l’entreprise. En caricaturant quelque peu, il est tentant de se lancer tête baissée dans l’option qui se présente en premier, qui fait partie de l’écosystème de la société ou « à la mode ». C’est ce qu’on pourrait appeler le choix par opportunité, et il est tout à fait compréhensible d’être séduit par cette approche rapide et, d’apparence, efficace. Et pourtant, il est des décisions qui ne doivent pas être prises à la légère, car elles ont un impact significatif sur les performances ou la robustesse de l’entreprise.

Qu’entend-on par veille technologique ?

Dans cet article, lorsque nous parlons de veille technologique, il s’agit d’un état de l’art sur un sujet technologique, qui débouche sur une analyse comparative, chiffrée et argumentée, permettant in fine de faire un choix optimal, en fonction des contraintes et de la vision d’une entreprise considérée.

Ce travail méthodique s’avère utile dans les cas suivants :

    • le choix d’un nouvel outil informatique répondant à un besoin identifié et précis ;
    • le positionnement d’une entreprise et de son activité, au niveau technologique, par rapport à ses concurrents ;
    • l’implémentation d’une nouvelle solution technique dans une architecture applicative existante ;
    • l’orientation des efforts de l’entreprise vers une philosophie différente d’un point de vue technologique ;
    • etc.

Une approche large, mais ciblée

La première chose à faire lorsqu’on aborde une veille technologique est de rédiger un cahier des charges de ce que doit faire l’outil (par facilité d’usage, nous utiliserons le terme « outil » pour décrire également une solution, une technologie ou une philosophie à évaluer et comparer dans une veille technologique), mais également de ce qu’il ne doit pas faire. En fixant un périmètre adéquat et proportionné par rapport aux besoins identifiés, présents et futurs, la sélection des candidats potentiels sera réduite et ne comptera pas « d’usines à gaz » trop complexes et, au final, inutiles.

À ce stade, il peut s’avérer intéressant d’établir une liste de critères de sélection. Par exemple, pour des raisons pratiques et techniques, on pourrait limiter la recherche à des outils fonctionnant exclusivement dans le cloud. Attention toutefois à garder un esprit ouvert et à ne pas être trop restrictif lors de cette étape. On pourrait passer à côté d’une solution intéressante à considérer pour l’évaluation.

La sélection des candidats

À moins que vous ne disposiez de ressources indéfinies en temps et en personnel, il est judicieux de ne pas définir une liste de candidats interminable, qui ne permettra qu’une évaluation sommaire et, de fait, inefficace. Il va sans dire que chaque situation est différente et requiert ses propres critères de sélection, mais on peut imaginer qu’une liste de 5 à 7 candidats est une bonne base. Moins de 5 et vous risqueriez d’éliminer un outil pourtant pertinent ; plus de 7 et les tests vous prendraient trop d’énergie.

L’évaluation comparative

Une fois votre liste d’outils candidats déterminée, on peut passer à l’évaluation proprement dite. Pour cela, il faut fixer une série de critères de comparaison, dont certains peuvent être repris de la liste des critères de sélection. Si lors de l’établissement du cahier des charges, les critères permettaient de considérer un outil ou non, on va ici étudier plus finement la manière de répondre au critère de manière qualitative ou quantitative. À titre d’exemple, si le critère est « auto-complétion des langages de programmation », le nombre de langages supportés pourra influencer le choix final (critère quantitatif). À contrario, si on souhaite évaluer la sécurité de connexion à une API, le mode d’appel et la manière d’échanger les informations sont primordiaux (critère qualitatif).

Les critères de comparaison

Si la forme que prend l’évaluation vous revient, nous préconisons au moins le remplissage d’un tableau à double entrée (outil/critère) via des notes chiffrées, permettant de réaliser une somme pondérée en fonction de l’importance du critère de comparaison considéré.

Voici des exemples de critères de comparaison :

    • installation possible on-premise (oui/non) ;
    • prises en charge d’extensions via des connecteurs (note chiffrée, par exemple de 1 à 5, établie sur base du nombre et de la pertinence des extensions considérée pour le projet) ;
    • vitesse d’exécution (en millisecondes) ;
    • prix ;
    • green IT (note subjective objectivée par des arguments d’ordre éthique ou environnementaux);
    • etc.


Vous le voyez, la sélection des critères de comparaison n’est pas une chose triviale. La combinaison de critères O/N, mesurés (performances) ou difficiles à comparer (plans tarifaires) implique de fixer un protocole qui peut s’appliquer à tous les candidats (par ex. une procédure de tests identique pour mesurer les performances). Ramener chaque résultat à une note selon une échelle établie (par ex. : de 0 à 5) peut s’avérer pratique. Si une veille technologique est forcément influencée par nos préjugés, l’idée est de l’aborder de la manière la plus neutre possible, en évaluant chaque outil sur un même pied d’égalité, sans privilégier l’un par rapport à l’autre.

Si vous préférez une approche plus nuancée et visuelle, il est également possible d’utiliser un outil d’aide à la décision qui combinera différentes méthodes de comparaison.

L’interprétation des résultats


Voilà, vous avez terminé le travail et un outil se démarque fortement des autres. Il n’y a donc pas à hésiter : vous allez utiliser celui-là ! Oui, mais…

Le « vainqueur » n’est pas toujours identifié de manière évidente. Il se peut que 2 voire 3 outils ne se distinguent que par quelques points d’écart. Que faire dans ce cas là ? En jouant sur les pondérations données à chaque critère, peut-être que c’est un outil différent qui remporte la victoire. Après tout, c’est vous qui avez fixé les poids en fonction de l’importance que vous donnez à chaque critère. Mais avez-vous envisagé votre besoin dans un futur plus ou moins proche ou juste sur le moment immédiat ?

En redéfinissant les pondérations, vous pouvez voir à quel moment un outil « passe devant l’autre », ce qui peut mettre en lumière un aspect que vous n’aviez pas considéré à sa juste valeur.

Parfois, tous les outils sont gagnants, un peu comme à l’École des Fans, si vous avez la référence. C’est probablement dû au choix de critères non discriminants, ne permettant pas de départager les candidats. Il sera judicieux d’élargir l’analyse comparative en ajoutant des critères peut-être moins concrets, comme le pays où sont stockées les données (aspect géopolitique) ou la sensibilité à la consommation énergétique (considérations d’ordre climatique).

La confirmation d’un choix pressenti


Parfois, souvent même, vous avez une idée en tête, un outil qui semble s’imposer de manière claire et évidente. Il est malgré tout intéressant de réaliser une veille technologique en bonne et due forme, ne fût-ce que pour confirmer, par un rapport scientifique et méthodique (références et mesures à l’appui), votre postulat de départ. Et peut-être ce travail vous permettra-t-il d’élargir votre horizon, en abordant des aspects ignorés jusque là…

Un processus cyclique


La veille technologique est un processus cyclique. Si dans un premier temps, elle permet de réaliser un choix d’outil et de technologie à implémenter, les avancées dans certains domaines sont tellement rapides qu’il est nécessaire de reconsidérer la question après un temps donné. C’est d’autant plus important si votre analyse consiste à vous positionner, d’un point de vue technologique, par rapport à vos concurrents. La mise en place d’indicateurs de résultats, ou KPI, est recommandée pour vérifier l’adéquation et la pertinence des choix réalisés. Travailler sur base de notes chiffrées et pondérées permet d’avoir une grille de lecture différente (en modifiant les poids des critères) en fonction de l’évolution de vos besoins (par exemple, vous cherchiez l’outil le moins cher lors de l’approche initiale alors que, dorénavant, ce n’est plus le cas car votre activité a évolué).

Les pièges à éviter


Lors de la phase de sélection, vous éliminez d’emblée un outil car il est trop onéreux, posez-vous néanmoins la question de la justification de l’écart de prix. Probablement, celui-ci est dû à une différence notable en termes de fonctionnalités, peut-être pas utiles pour vous, mais il est bon de le vérifier.

Ne vous limitez pas à des critères on/off ou oui/non dans le choix des critères. Apportez de la nuance, par des mesures ou des appréciations chiffrées.

Ne vous fiez pas aveuglément à la documentation d’un éditeur ou à un article qui semble orienté. Gardez un esprit critique.

Besoin d’aide ?


Bien que j’aie mes domaines de prédilection, je ne vous propose pas de réaliser une veille technologique de A à Z, mais je peux vous assister dans l’accompagnement de ce travail d’analyse comparative. En vous aidant à vous poser les bonnes questions, via des ateliers d’élicitation, je peux vous aider à challenger, animer et guider vos collaborateurs internes ou experts externes, afin de réaliser un choix pertinent, argumenté et adapté à vos besoins réels, présents et à venir.

Si je propose ce genre de services, c’est parce que j’ai acquis une certaine expérience en la matière, en accompagnant et évaluant le travail universitaire d’étudiants et ce, dans divers domaines (développement d’applications, infrastructure, AI, Infrastructure as Code, IoT…), depuis 2016.